Philosophie du Pays de neige

Je vais vous parler d’une manière de considérer la neige et la montagne qui correspond à un style de vie. C’est celui des habitants du Pays de neige. Viendrez-vous avec moi dans ce beau Pays ?


Une approche douce

L’idée d’un « Pays de neige » ne dénote pas quelque chose de concret, mais une manière de considérer la montagne et la neige, elle évoque un style de vie, un idéal.

L’idéologie dominante de la montagne valorise les exploits spectaculaires, la débauche technologique, l’un et l’autre au service du consumérisme et du tourisme de masse. On veut vaincre les montagnes, les gravir, les asservir, les exploiter, les rentabiliser. Tout au contraire, on pourrait considérer la considérer avec respect et sympathie. On pourrait aborder la neige et la montagne respectueusement pour profiter de la beauté et de la sérénité qu’elle offre. Quel que soit l’enjeu, touristique, agricole, technique ou sportif, la façon de faire pourrait être paisible, respectueuse et durable. Il faudrait en avoir la volonté et en tirer les conséquences politiques.

La culture japonaise traditionnelle (pas la moderne) est l’une de celles qui a le plus intégré la nature. Le caractère sacré de la nature et le profond respect qui en découle vient de la religion Shinto, pour laquelle la plupart des éléments du paysage naturel sont considérés comme sacrés et devant être préservés. Sans adhérer à l’animisme, qui projette des esprits ou des personnes fictives là où il n’y en a pas, on pourrait considérer, en s’inspirant de la tradition japonaise, les espaces naturels avec délicatesse et respect.

Dans notre culture occidentale, déjà, en 1761 avec La nouvelle Héloïse, Jean-Jacques Rousseau nous y invitait..

« Il semble qu’en s’élevant au-dessus du séjour des hommes, on y laisse tous les sentiments bas et terrestres, et qu’à mesure qu’on approche des régions éthérées, l’âme contracte quelque chose de leur inaltérable pureté. On y est grave sans mélancolie, paisible sans indolence, content d’être et de penser : tous les désirs trop vifs s’émoussent, ils perdent cette pointe aiguë qui les rend douloureux ; ils ne laissent au fond du cœur qu’une émotion légère et douce ; et c’est ainsi qu’un heureux climat fait servir à la félicité de l’homme les passions qui font ailleurs son tourment » (La nouvelle Héloïse).

C’est une expérience largement partagée que de ressentir une paix intérieure et une certaine sérénité en montagne.

Modération et (合) harmonie 

La culture japonaise traditionnelle peut aussi aider à mieux définir cet état d’esprit philosophique de modération. En japonais dō (道) signifie « voie » au sens d’évolution personnelle. Il en existe de nombreuses qui ont généralement pour but d’acquérir un contrôle de soi par une pratique quelle qu’elle soit. La pratique de la montagne peut en être une parmi d’autres. On y rencontre le problème d’avoir une attitude calme et efficace face à une contrainte forte : le danger de certaines situations.

Deux autres termes japonais peuvent nous aider à réfléchir sur la pratique de la montagne, celui de (合) (harmonie) et ki (気) traduisible par force ou énergie. Dans l’aïkido, art martial très connu, il s’agit de rechercher le geste qui utilise au mieux l’énergie disponible. On peut appliquer le même principe en ski, le résultat visible étant la technique fluide et douce qu’on pourrait nommer le ski en harmonie.

Pour pratiquer la montagne et le ski de montagne, il faut porter une bonne attention à l’environnement, afin d’adapter son cheminement. Cela demande une connaissance du milieu, une attention portée à la neige et au rocher, ce qui est une condition de sécurité, mais fait aussi partie de l’attitude de , de recherche d’harmonie et d’adaptation à l’environnement.

Technique et nature

Le terme de nature est ambigu, car emprunt de pensée magique et d’animisme. Nous l’emploierons ici pour désigner un environnement peu modifié par l’homme dans lequel les écosystèmes sont pérennes.

Technique et nature ne s’opposent pas nécessairement. Marcher avec des crampons et un piolet, skier, ce n’est pas naturel, ce sont des activités techniques qui demandent des instruments appropriés, fabriqués de toutes pièces. Cependant, la technique du ski permet aussi de glisser en douceur, en profitant de la pesanteur comme moteur. Dans ce cas, nature et technique sont en harmonie, car la technique s’adapte et s’intègre à l’environnement.

Technique et environnement s’opposent farouchement, si on fait de la technique un usage brutal, massif et par là destructeur. Quelques centaines de skieurs qui randonnent dans un massif ne font pas de dégâts. Des dizaines de milliers de skieurs qui raclent de la neige à canon, et tout bascule : le paysage est ruiné, la quiétude finie, la faune chassée, les équilibres bouleversés. Il y a un rapport entre gigantisme et destruction de l’environnement naturel. Défigurer la montagne à coup de bulldozer pour la transformer en parc d’attraction à usage de masse est incompatible avec le respect de l’environnement.

Le jardin d’Épicure est resté célèbre comme lieu paisible et protégé. Un jardin s’entretient, il demande du soin. La montagne pourrait être vue comme un vaste jardin que l’on protège et dont on profite, plutôt que comme une friche servant à l’industrie touristique. Promouvoir l’idée d’une insertion harmonieuse de l’homme dans son environnement naturel, d’une alliance pérenne entre la nature et la société est un idéal qui n’a rien d’absurde. En montagne, il reste des espaces encore indemnes et qu’il serait possible de conserver sans conséquences économiques fâcheuses.

Si ces espaces persistent, certains pourront encore nous faire part, dans l’avenir, de l’expérience qu’ils procurent, comme Cédric :

« Être là. Partir tôt, que la journée soit longue …. Aller où bon nous semble …. S’extraire joyeusement d’en bas, pas à pas, quitter le plat, s’élever sur les plis de la terre, là où les courbes de niveau se serrent jusqu’à s’unir … »

ou comme Selma :

« Je me souviens aussi de paysages magnifiques, de la joie de l’effort, de la saine fatigue du soir ».

Deux options

Parce qu’il est là ?

La réponse de l’alpiniste Georges Mallory concernant sa volonté de gravir l’Everest « parce qu’il est là » est restée célèbre. Elle est pourtant absurde. Toute la réalité est là, d’autres montagnes sont là. C’est en creux, implicitement, que cette phrase prend un sens : au titre d’être la plus haute montagne, elle constitue un défi à relever. L’Everest qui, d’évidence, ne dit rien et ne demande rien, par le fait même d’exister, constituerait un défi. Il faudrait donc l’affronter, le gravir, le vaincre, le conquérir.

C’est l’expression d’une culture brutale, vindicative, conquérante, sans limite. Il suffit que ce soit là pour que l’on veuille s’en emparer, y planter un drapeau, y apposer un signe religieux distinctif. Cette approche correspond bien à une philosophie, une façon de penser, qui valorise un rapport agressif et conquérant, d’appropriation et de domination du monde et de la montagne. « L’alpinisme traditionnel est venu d’un appétit de conquête » dit Reinhold Messner,

On pourrait tout aussi bien contempler respectueusement les sommets. Il se trouve nombre de cultures traditionnelles pour laisser des territoires vierges et les déclarer sacrés. On pourrait aussi gravir les montagnes discrètement, sans crier à l’exploit, sans héroïsme mortifère, ni débauche de moyens technologiques. C’est une autre philosophie qui serait à l’œuvre, une philosophie valorisant le respect du cadre naturel et une vie humaine en harmonie avec lui. Ce serait une autre philosophie et un autre mode de vie.

Selon l’épicurisme, la sagesse consiste à éviter les troubles du corps et de l’âme, à rechercher la santé et la sérénité. Il faut pour cela éviter l’exacerbation commune des désirs et des craintes. On retrouve là l’enseignement du bouddhisme et du Yoga classique, mais avec une différence très nette : la limitation épicurienne n’est pas l’abolition du désir et de la crainte. L’épicurien recherche le plaisir, il veut jouir de la vie, mais de manière paisible. C’est une manière de faire possible en montagne. À une certaine altitude, on ressent une alacrité, un mélange de vivacité et d’enjouement toniques.

Glisser discrètement

Sociabilité et montagne

En montagne, la faible densité de population, l’habitat relativement dispersé, les conditions de vie rudes, sont favorables à une vie sociale plus sereine, car présentant plus d’occasions d’entraide. Encore faut-il éviter les conflits et rivalités qui naissent, comme partout, entre humains. C’est un peu plus facile que dans les endroits surpeuplés, déculturés et anonymes, car une identité commune, celle de montagnard, d’habitant de la vallée, et quelques valeurs partagées, aident à faire du lien entre les personnes.

La sérénité individuelle demande un équilibre relationnel auquel un certain retrait de la vie sociale peut être utile. C’est ce que l’on peut trouver en montagne si on le cherche. Ce retrait diminue les innombrables pressions, sollicitations, contagions affectives de la vie sociale qui empêchent l’autonomie et une pensée sereine.

Les occasions d’entraide sont présentes face à l’hostilité des éléments : routes et trains bloqués par la neige, personnes ensevelies par une coulée, maisons menacées par l’avalanche. En randonnée, la sympathie simple et pratique du geste utile émerge spontanément. La main qui porte secours ne demande pas le pedigree de la personne à aider. La solidarité, le compagnonnage humain se manifestent plus facilement. On trouve donc globalement un climat social un peu plus serein.

La montagne, la neige, le froid donnent une dureté du quotidien. Tout est un peu plus difficile, pénible, il faut faire attention en permanence. L’hostilité de l’environnement naturel n’est pas que négatif, il peut aussi être un atout. Il oblige à mettre en œuvre ses ressources, il resserre les liens entre humains, il éprouve et renforce la volonté. Face à l’hostilité des éléments, la ténacité et le sentiment d’exister se renforcent. L’adage « faire de nécessité vertu » se vérifie. Cette nécessité d’un effort au quotidien rend (parfois) plus vertueux celui qui s’y confronte.

Travail de déneigement

Culture montagne

La culture forge la réalité, elle contribue à la manière de la percevoir et de la considérer. Si les glaciers sont des enfers froids habités par des diables, comme dans certaines traditions dont la chamoniarde), comment les percevra-t-on ? osera-t-on s’y aventurer ? Si les montagnes ne sont rien, ne font l’objet d’aucune représentation, on les vivra comme de pures contraintes ; on y enverra les ex-bagnards comme à Val d’Isère ; on y verra que des choses inertes simplement existantes comme Georg Wilhelm Friedrich Hegel : « La vue de ces masses éternellement mortes ne suscita en moi, si ce n’est l’idée uniforme, et à la longue ennuyeuse : c’est ainsi ». Il note la réalité réduite à son existence concrète.

Actuellement, il y un art populaire de la montagne, une culture littéraire, photographique, filmique, qui met en avant l’exploit des alpinistes, des grandes gerbes de neige des « free riders », le tout sponsorisé par les marques commerciales. Le Pays de neige propose une toute autre culture de la montagne, une culture valorisant la beauté du milieu naturel, un rapport méditatif avec le paysage et une façon de vivre intégrée à la neige et à la montagne.

« Le spectacle qu’offrait le monde était féerique, enfantin et étrange. Les épais coussins de neige légère et bouffante sur les branches, les bosses du sol dissimulant des arbustes rampants ou des rochers en saillie, les formes du paysage tapies, enfouies, à l’affublement grotesque, donnaient à voir un monde de lutins à l’aspect cocasse, comme sorti d’un conte. Si le devant de la scène, où l’on progressait à grand-peine, avait une allure fantastique et malicieuse, les Alpes enneigées, échelonnant à l’arrière-plan leurs statues qui pointaient au loin, produisaient une impression d’élévation hiératique » (La Montagne magique Thomas Mann).

L’environnement naturel nous offre des spectacles d’une incroyable beauté. Nous pourrions y être indifférents et, d’ailleurs, certaines personnes le sont. Mais, pour d’autres, le plaisir esthétique est évident et important. D’où vient la beauté ? On peut évoquer une harmonie entre nous et la réalité naturelle, une résonance particulière produisant un plaisir que l’on nomme esthétique.

En montagne, il y a tant de beauté que l’on s’y perd. Celle de la neige simplifie. Le paysage perd ses aspérités, sa complexité, lavé de ses impuretés, de ses difficultés. La lumière prend de l’importance, elle se diffracte et les couleurs, lorsqu’elles sortent des brumes, apparaissent encore plus resplendissantes. Celle du ciel fascine. Il prend des nuances infinies qui se déploient et nous étonnent, il se forme des contrastes inattendus, des changements incessants. La danse des nuages peut être grandiose. Il y a aussi la verticalité et de la démesure. Il y une beauté étrange du vertigineux et de l’immense. On ressent de l’effroi devant ce qui nous dépasse et nous éblouit, mais si l’on est en sécurité cet effroi se transforme et en sentiment de sublime et en émerveillement.

La beauté apporte un apaisement, une joie utiles à la sérénité quotidienne. C’est une motivation pour aller en montagne ou dans la neige. Contempler est aussi une attitude, une manière de se conduire qui impliquent d’être disponible, de se porter vers l’extérieur. Pour percevoir, apprécier, aimer, il ne faut pas être centré sur soi, ne pas aller vite, ne pas faire de la performance, ne pas risquer sa vie ou sa santé en se mettant en danger.

Couleurs paradisiaques

Sortir de soi ?

La montagne, surtout enneigée, et surtout la haute montagne, sont dures et dangereuses. De nombreuses personnes y meurent ou en reviennent blessées ; en ayant « dévissé » à cause d’une chute de rocher, en étant tombées dans une crevasse, en s’étant fait « encaver » par une avalanche. Aller au Pays de neige, c’est, d’abord et avant tout, être prudent, éviter le danger, afin de rencontrer ce que la montagne offre comme étonnantes merveilles, comme dépaysements oniriques.

La montagne demande des efforts. Mais il y a divers types d’efforts et tous ne se valent pas au regard du bien que l’on peut en retirer. Un effort trop intense, trop prolongé, mal préparé, crée une souffrance. Mais, l’entraînement et un rythme adapté permettent de monter sans souffrance et même agréablement lorsque se manifeste le bon fonctionnement du corps en action. L’effort accomplit permet de ressentir une « bonne fatigue » selon l’expression consacrée. C’est une fatigue modérée, ressentie comme satisfaisante et apaisante. Cette fatigue, quand on s’arrête pour se reposer, donne un sentiment de relâchement et de bien-être.

La qualité de l’effort dépend du but cherché. Si ce but est une performance toujours plus grande, il faut sans cesse et toujours plus d’efforts. Avec à la clé, la douleur, le malaise, la blessure et parfois l’accident. Une philosophie de la modération dénonce cet excès, ce toujours plus, valorisé par la compétition. Le but de l’effort est d’avoir la condition musculaire, l’endurance et l’acclimatation nécessaires pour se déplacer et aller là où on le souhaite en montagne, que ce soit à pied ou à ski. La pratique de la montagne peut être épicurienne : il s’agit d’en jouir au mieux en préservant sa vie et sa santé, d’accepter l’effort, mais sans s’épuiser ou se blesser.

Aller au Pays de neige, c’est aller vers des instants d’intensité où le temps s’arrête, où le vécu se grave dans la mémoire pour toujours ; c’est provisoirement échapper à la tyrannie du temps pour vivre de fugaces moments d’éternité. Il n’est pas besoin de faire des courses difficiles et dangereuses pour cela, bien au contraire. Le Pays de neige est partout où le poudroiement blanc apporte un peu de pureté et d’idéal. La difficulté tient plutôt à soi-même : se mettre dans l’état d’esprit propice à cette rencontre.

Ski dans les nuages
Skier dans les nuages

Danger et responsabilité

Aller en montagne, surtout en haute montagne, c’est affronter le danger. On notera qu’affronter le danger ce n’est pas risquer un accident, mais tout au contraire prendre les décisions qui permettrons de l’éviter. Il y a pour le montagnard responsable – mais tous ne le sont pas – un exercice intellectuel au quotidien : apprécier, décider. Face à un danger la responsabilité vis-à-vis de soi et des autres, demande de prendre des décisions réfléchies.

La responsabilité impose de mesurer les conséquences du risque et de prendre la décision qui va le réduire, en particulier celle de renoncer, si le risque est trop grand ou si ses conséquences éventuelles sont trop graves. Un effort de distanciation et un retour sur soi s’imposent pour savoir si ce qui nous motive à agir au moment présent est bien conforme à la finalité de l’action entreprise. On pourrait croire cette maxime abstraite est très générale. Il n’en est rien, elle s’applique à toutes les décisions prises en montagne. C’est en ne la respectant pas que nombre d’accidents arrivent. Et ils sont nombreux.

La finalité d’une course c’est de profiter de la montagne et d’en revenir. Ce sont des motivations annexes et irrecevables (exploit, gloriole, jeu avec le danger, compétition) qui conduisent à prendre des risques inconsidérés, comme aller trop vite, s’épuiser, sauter un relais, prendre un itinéraire trop exposé, négliger les avertissements météo. Pour éviter de mauvaises décisions, on doit se demander si elles ne viennent pas de motivations sans valeur eu égard à l’essentiel qui est de vivre (et non de mourir dans un accident).

Seul ou en groupe, chacun et à chaque instant se doit d’inventer la conduite qui sera utile à tous. La haute montagne oblige à des décisions, à la responsabilité pour soi et pour les autres. Le danger est présent, il faut choisir la bonne voie : la plus sûre, ou la plus rapide, ou la plus facile, ça dépend du moment, ou encore aucune d’entre elles et renoncer au bon moment.

Cet exercice donne une vie d’action plus forte que la vie ordinaire citadine ou campagnarde. La confrontation à un milieu difficile, parfois hostile, impose de choisir et donc d’exercer sa volonté et sa responsabilité. L’idéal qui nous porte et nous met en mouvement vers les sommets est formateur pour la personnalité. L’idéal d’une vie montagnarde apporte une certaine dignité, car il est exigeant.

Jouer en montagne ?

L’homme, bipède sans fourrure, est un coureur de savane, un arpenteur de forêts. Il n’est pas adapté au froid, à l’altitude, à la neige, aux parois abruptes. Sa curiosité, son appétit de dépassement, le poussent à y aller, même si ce n’est pas nécessaire. Pour cela, il doit s’équiper : se couvrir, s’armer d’instruments techniques comme des chaussures, des crampons, des piolets, des cordes, des skis.

L’homme aime faire un usage gratuit de ses capacités pour le plaisir de les exercer. Il aime s’affranchir de ses limitations, pour dépasser les contraintes qui pèsent sur lui. Glisser à ski c’est ruser avec la pesanteur qui nous cloue au sol. Escalader c’est monter là où cela paraît impossible. Aller dans le froid et la neige c’est découvrir des univers inconnus. Mais ce n’est pas vraiment un jeu, car il n’y a pas de semblant : les risques sont réels.

À cette exploration des possibles s’oppose le ski consumériste effectué dans des parcs aménagés prévus à cet effet. Lorsque l’on voit les adultes jouer dans leurs cours de récréation enneigées, on ne peut pas vraiment parler de dignité humaine, mais plutôt d’infantilisation de masse. Glisser en troupeau sur des pistes damées, parsemées de pylônes, pour ensuite aller faire la queue au remonte-pente et manger des hamburgers, est une activité pauvre et sans créativité, faite pour enrichir l’industrie touristique.

Glisser en troupeau

Conclusion provisoire

L’opposition qui occasionne une sorte de guerre entre nature, culture, environnement et société a, avec le progrès industriel et les loisirs de masse, des effets désastreux sur les équilibres écologiques et, en particulier, sur la neige et les glaciers à cause du réchauffement. À la place de cette relation d’opposition-affrontement, on peut suggérer, comme horizon civilisationnel, la recherche d’une relation harmonieuse entre les sociétés humaines et leur environnement. 

Faute d’une adhésion collective à ce projet, il reste, à titre individuel, la possibilité de s’éloigner et de considérer la montagne et la neige avec respect et sympathie. Elles apportent, à ceux qui savent en profiter, des occasions d’émerveillement, de plaisir esthétique et de sérénité.

Nous sommes bien trop peu à espérer que la neige et les montagnes restent indemnes des destructions climatiques, industrielles et touristiques ; ce qui incite à reprendre les paroles saisissantes de John Waller et Ben Canales au sujet du Sandy Glacier au Mt Hood : « Ma fin est proche – Le temps façonnera mon héritage ».

À lire aussi, l’article sur L’Art de la trace.

>> Feuilleter l’album : Philosopher en montagne

Illustrations

HIGHER GROUND est une vidéo sur le massif du Mont-Blanc, dans l’esprit du Pays de neige, faite par Florian Nick et Julian Lindenmann. Elle permet de comprendre le plaisir esthétique donné par la montagne.


MUSIQUE dans la NEIGE avec Kepa. Voici une vidéo dans laquelle la musique et la neige sont dans une merveilleuse symbiose. Elle offre un formidable moment contemplatif qui fait saisir toute la beauté de la montagne enneigée.


MON PAYS C’EST L’HIVER ! Gilles Vigneault nous invite au Pays de l’hiver, le pays de « La blanche cérémonie / Où la neige au vent se marie ». L’hiver est plus qu’une saison au Québec, il fait partie de la culture. Le Pays de neige, c’est aussi un Pays sans frontière, où nature et culture se marient.


Pour ceux qui s’intéressent à la philosophie en général, voir : Philosophie, Science et Société
Pour la préservation de la montagne : Mountain Wilderness


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